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Jeu de décision et recommandations d’action de Leader’s Digest #2

Concernant le jeu de décision du Leader’s Digest #2 nous avons reçu une recommandation d’action bien pensée et fondée du cap Nicolas Penseyres. Le lt col EMG Patrick Hofstetter, professeur de conduite et de communication à l’Académie militaire de l’EPF de Zurich a commenté cet envoi et l’a récompensé par un exemplaire du livre du mois.

Les jeux de décision de Leader’s Digest doivent inciter les abonnés de cette newsletter à de se mettre – dans le cadre de scénarios – dans le rôle de personnes qui se trouvent confrontées à des défis éthiques ou tactiques.

Nous commençons par répéter le scénario présenté par le lt col EMG Olaf Niederberger ; ensuite, nous présentons une appréciation des points les plus importants à discuter. Les recommandations d’action sont présentées par le lt col EMG Patrick Hofstetter, professeur de conduite et de communication à l’Académie militaire de l’EPF de Zurich.

Jeu de décision de Leader’s Digest #2

Adversaire

La nuit a apporté la clarté. L’impossible s’est produit. C’est la guerre. À 0300, la population a été terrorisée par les sirènes d’alarme. Des dizaines d’explosions se faisaient entendre au loin. On peut supposer que des armes à distance sont utilisées contre des cibles clés. Alors que l’Internet et la téléphonie mobile subissent une panne totale depuis minuit, les liaisons radio sont constamment interrompues. Selon les derniers rapports non confirmés, des forces mécanisées ennemies se seraient installées dans une zone d’attente à plusieurs kilomètres au nord du fleuve frontalier. Avant le lever du soleil, plusieurs hélicoptères de transport et de combat ont survolé notre secteur à basse altitude en direction de la plaque tournante autoroutière vers le sud-ouest. L’installation du CGE (conduite de la guerre électronique) sur la colline Z est en feu. Le cap Honsberger, à la base non-fumeur, écrase sa cigarette, maudit mentalement l’état-major général et dit à son ordonnance de combat : « On a manifestement omis de faire savoir à l’ennemi qu’il s’agit ici d’une zone secondaire ».

Forces propres

L’effectif de la compagnie de défense territoriale (milice) du cap Honsberger a triplé au cours des dernières semaines pour atteindre une centaine de militaires. Il n’aurait pas manqué encore plus de volontaires des environs, mais l’équipement manquait. Honsberger était satisfait de sa sélection. En tant que conseiller municipal et enseignant, il connaissait personnellement de nombreux candidats. Il a choisi les personnes en fonction de leurs connaissances militaires préalables, de leurs qualités de caractère et, dans certains cas, de leurs connaissances spécifiques, par exemple l’expérience avec les drones ou la possession d’une formation sanitaire étendue. Il avait un bon sentiment à l’égard de sa compagnie, d’autant plus que toutes les fonctions clés étaient occupées par des « anciens ». La seule chose qui lui donnait mal au ventre était le fait qu’en raison des missions en cours et de la charge administrative liée à la « montée en puissance », il n’y avait guère de temps pour vérifier la formation.

La compagnie du cap Honsberger se compose de trois sections d’infanterie légère de trois groupes chacune. La mobilité est assurée par des véhicules tout-terrain, des motos et des vélos électriques réquisitionnés.

La section d’appui du cap Honsberger se compose de deux groupes antichars (1 char de grenadiers à roues 93 et 1 missile antichar NLAW), d’une troupe d’éclaireurs avec 4 MOTS Mini-UAV, d’une troupe d’appui de feu avec un fusil de tireur d’élite 8.6mm et un mortier 6cm, d’un élément logistique composé d’une troupe de ravitaillement, d’une troupe de maintenance et d’une troupe sanitaire ainsi que d’un élément de commandement. Des munitions supplémentaires sont entreposées depuis deux jours dans le magasin de munitions de la compagnie dans la forêt Y (voir carte) (entre autres 12x NLAW, 24x RGW 90, toutes deux des armes antichars, 48x mortiers 6cm, 3x charge cratère 88).

Outre l’instruction des nouveaux incorporés, la compagnie a également assumé des tâches de sécurité pendant plusieurs jours. Outre les patrouilles et les postes d’observation à proximité de la frontière, la compagnie a sécurisé le seul passage frontalier, désormais fermé, et l’a préparé pour le faire sauter. En outre, le cap Honsberger a été chargé de protéger une installation tactique partiellement mobile de la CGE sur la colline Z. Tous les soldats du cap Honsberger étaient originaires des environs et passaient leur temps de repos à la maison. Un groupe Stinger qui ne lui était pas subordonné et qui s’était installé sur la colline X se trouvait aussi dans le secteur d’engagement du cap Honsberger.

Entre 0545 et 0600, les hommes de liaison des sections sont arrivés sur leurs vélos électriques au poste de commandement de la compagnie (comportement standard en cas de rupture de communication).

  • Homme de liaison AMBOS : pas de contact avec le groupe UNO. Un échange de tirs en provenance du poste-frontière était audible. Une douzaine d’habitants du village se sont rassemblés près de la mairie avec des armes privées. Entre-temps, des tirs ont lieu au centre du village, sans que l’on sache contre qui. Le chef de section AMBOS demande à deux groupes de se rendre au poste frontière et de faire sauter le pont.
  • Homme de liaison BIVIO : Il y a un mur de fumée artificiel sur la rive nord. Bruits de moteurs lourds en provenance du nord. Deux de nos minidrones privés se sont écrasés. Le groupe UNO surveille le terrain, mais ne voit pas grand-chose. Les groupes DUE et TRE sont arrivés au complet au point de rassemblement. Nous aurions un bateau, le chef de section demande s’il peut franchir la frontière pour éclaircir les activités ennemies. En outre, le groupe Stinger semble avoir abattu un hélicoptère. Apparemment, il y a eu des survivants qui ont pris la fuite, des habitants armés du village B fouillent la forêt U avec des chiens.
  • Homme de liaison CANALE : Il y a eu un impact sur les installations de la CGE. Pas de liaison avec le groupe UNO sur place. Le chef de section a envoyé un groupe pour apporter éventuellement les premiers secours, trois civils de la section de samaritains se sont joints au groupe. Le reste de la section est au point de rassemblement et attend tes ordres.

Mission

Le cap Honsberger se creuse la tête. En fait, sa mission est la suivante : « marquer une présence, effectuer des reconnaissances dans ton secteur, lier les forces irrégulières et créer ainsi des conditions favorables à l’engagement des forces d’intervention ». Au cas où, contre toute attente, les forces régulières adverses franchiraient la frontière nationale dans sa section, il est simplement décrit dans un plan d’intervention supérieur que les forces territoriales dans la zone secondaire doivent « combattre » l’adversaire à partir de la frontière nationale afin de permettre un déplacement du centre de gravité au niveau opérationnel. La doctrine précise en outre qu’en cas de percée de l’ennemi, les forces territoriales doivent « mener le combat de manière autonome pendant une période prolongée au moyen d’actions de type aiguille ».

Environnement

Le village A compte environ 4000 habitants et possède un centre historique. Les villages B, C, D et E comptent entre 1000 et 2000 habitants. Les bâtiments sont un mélange d’habitations solides, parfois historiques, et de constructions commerciales parfois plus légères. Le terrain intermédiaire est parsemé de haies, d’arbres isolés, de quelques murs en pierres sèches et de fermes isolées. Il ne présente que rarement des distances de tir supérieures à 400m. A l’ouest du pont, la rivière frontalière présente deux endroits qui, après environ une heure de préparation, seraient appropriés pour le passage à gué. Entre la colline W et X se trouve un obstacle antichar.

Question

Comment agissez-vous dans ce scénario en tant que cap Honsberger ?

Recommandation d’action du jeu de décision de Leader’s Digest #2

Après avoir reçu douze réponses au Ethical Decision Game en janvier, nous n’avons reçu qu’une seule recommandation d’action au Tactical Decision Game en février, bien que le nombre d’abonnés soit heureusement passé à plus que 900. Cela a suscité trois réflexions au sein de la rédaction :

  • La désignation du vainqueur est cette fois nettement plus facile, et comme il s’agit d’une solution possible bien pensée, elle nous semble justifiée.
  • Cela nous renforce dans notre opinion que nous parlons beaucoup trop peu de conduite tactique dans l’armée suisse et que la formation au commandement est trop axée sur la sécurité procédurale (Management / gestion) et pas assez sur la sécurité d’action (Command / commandement).
  • Cela ne veut pas dire que nous parlons trop de sécurité de comportement (Leadership). C’est pourquoi nous continuerons, comme prévu, à soulever en alternance des Ethical Decision Games et des Tactical Decision Games. Pour être en mesure de nous défendre, nous devons renforcer ces deux aspects.

Voici la solution proposée, y compris l’esquisse du gagnant, commentée par le lt col EMG Patrick Hofstetter. Les commentaires ne se veulent pas exhaustifs, mais soulignent certains points à titre d’exemple. La solution a été soumise sous la forme d’un ordre en cinq points, ce qui est tout à fait conforme à l’objectif. Le croquis fait alors partie de la donnée d’ordre – chaque chef de section doit en recevoir une copie.

Dans l’orientation, le commandant de compagnie expose les poussées adverses possibles sur le pont et sur les endroits possibles pour passer à gué (entre U et Q). Manifestement, le vainqueur connaît le déroulement d’une attaque mécanisée et l’expose de manière compréhensible aux chefs de section. Mais il indique aussi les éventuelles forces irrégulières adverses, ce qui me semble important, d’une part comme explication possible du bruit de tir dans le village A et donc comme besoin particulier de renseignement, d’autre part comme sensibilisation.

L’intention est divisée en deux phases : une phase de préparation de 60 minutes, suivie d’une phase de combat de 270 minutes au moins. Cela me semble approprié et réaliste compte tenu du temps nécessaire pour péter. La première phase est beaucoup trop détaillée à mon goût. Elle comprend sept points qui correspondent plutôt à des ordres individuels et qui surpassent parfois les chefs de section. Exemple : Si, en tant que commandant de compagnie, j’ai l’intention de « faire sauter le pont avec un groupe », je retire au chef de section concerné la liberté de manœuvre de le faire avec deux groupes. En raison du bruit de tir dans le secteur A, il pourrait être indiqué de le faire au moyen de deux groupes en feu et en mouvement – le pont est sans aucun doute un terrain clé, ce qui justifierait un effort principal. La deuxième phase est en revanche concise et claire dans la combinaison des mots et de l’image.

Les missions données aux sections de combat sont simples. Pour l’essentiel, chaque section reçoit une mission de ralentissement avec des missions secondaires (AMBOS : détruire le pont ; BIVIO : examiner l’épave de l’hélicoptère ; CANALE : secourir l’élément CGE). Pour la section de soutien, la situation est un peu différente avec neuf missions. On peut se demander si une section d’appui – par analogie au réseau senseurs-effecteurs que la compagnie d’appui doit assurer dans la doctrine de l’infanterie – peut et doit réellement agir sur tous les secteurs des sections. Ainsi, je confierais par exemple la mission de faire sauter les axes secondaires aux sections des secteurs respectifs et je concentrerais plutôt la section d’appui pour créer un effort principal dans le fuseau de défense ouest. Il reste en tout cas à espérer que le chef de section a un talent d’organisateur.

En ce qui concerne les dispositions particulières, le vainqueur souligne l’importance de l’autonomie, ce qui est certainement justifié au vu du défi en matière de communication et de coordination. En ce qui concerne les emplacements, il mentionne, outre le poste de combat de la compagnie (colline X), les points de ravitaillement pour les munitions, certainement une mesure de coordination décisive.

En résumé, il s’agit d’une solution possible bien pensée et fondée. Bien sûr, des critiques peuvent – et doivent – être formulées. Ce qui est décisif, c’est que dans une telle situation, un commandant de compagnie offre une orientation à ses subordonnés et communique son intention, ce que le gagnant a réussi à faire. Nous remercions le cap Nicolas Penseyres et le félicitons d’avoir remporté le livre du mois. Nous lui enverrons bientôt « About Face: Odyssey of An American Warrior » de David H. Hackworth.

En outre, nous encourageons tous les lecteurs à s’essayer à un tactical decision game. Les chances de gagner devraient rester relativement élevées.

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